Compte tenu du lien d’indivisibilité existant en matière d’admission des créances entre le créancier, le débiteur et le liquidateur, l’épouse du gérant de la société débitrice, en tant que « personne intéressée » au sens de l’article R. 624-8 du code de commerce, appelante de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa réclamation contre une décision d’admission portée sur l’état des créances, aurait dû appeler à l’instance l’ensemble de ces parties.
Il est question, dans cet arrêt d’intérêt purement procédural, d’une réclamation devant le juge-commissaire d’une créance admise au passif d’une procédure collective. Selon l’article R. 624-8, alinéa 3, du code de commerce, « tout intéressé peut présenter une réclamation devant le juge-commissaire dans le délai d’un mois à compter de la publication » de la décision d’admission. L’article R. 624-10, alinéa 3, ajoute que « le recours contre les décisions du juge-commissaire statuant sur une réclamation est formé devant la cour d’appel ».
Dans l’affaire jugée, il s’agit d’une banque qui a accordé à une société un prêt garanti par une hypothèque constituée par le gérant de la société emprunteuse, hypothèque à laquelle a consenti son épouse. La société ayant été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire, respectivement les 30 septembre 1994 et 27 octobre 1995, le juge-commissaire, par une ordonnance du 18 mai 2001, a admis la créance d’une société tierce, qui se trouve être le cessionnaire de la créance de prêt consenti par la banque. L’épouse du gérant a formé réclamation devant le juge-commissaire contre cette décision d’admission par déclaration au greffe du tribunal de commerce du 6 avril 2012. Le mandataire ad hoc de la société débitrice, la banque créancière et le liquidateur ont été convoqués devant le juge-commissaire. Ce dernier a déclaré recevable la réclamation de l’épouse mais l’a rejetée. Cette dernière a alors fait appel de cette ordonnance, en intimant le liquidateur, ès qualités, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société débitrice, et la société créancière (cessionnaire de la créance de prêt), puis s’est désistée de son appel contre la société débitrice et contre la société créancière. Le liquidateur, demeurant seul intimé, a alors formé un incident pour voir déclarer l’appel irrecevable. Il obtient gain de cause.
La cour d’appel d’Aix-en-Provence confirme, en effet, l’ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré l’appel de l’épouse irrecevable. Cette dernière forme alors un pourvoi en cassation, mais ce pourvoi est à son tour rejeté, rejet que la Haute juridiction justifie, dans son attendu, dans les termes suivants : « le lien d’indivisibilité existant en matière d’admission des créances entre le créancier, le débiteur et le liquidateur implique que la personne intéressée, appelante de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa réclamation contre une décision d’admission portée sur l’état des créances, appelle à l’instance l’ensemble de ces parties ; qu’ayant relevé que tant la société créancière, que le mandataire ad hoc de la société débitrice et le liquidateur étaient parties devant le juge-commissaire saisi de la réclamation de [l’épouse du gérant de la société débitrice] et que cette dernière, après les avoir tous intimés par sa déclaration d’appel, s’est désistée de son appel à l’égard du créancier et du débiteur, l’arrêt retient exactement que la décision à intervenir sur la réclamation étant susceptible d’avoir une incidence sur l’admission de la créance et l’appel de la décision statuant sur la réclamation, dont la cour d’appel demeure saisie, n’opposant plus que la personne intéressée formant la réclamation et le liquidateur, cet appel est irrecevable ».
Compte tenu du lien d’indivisibilité existant en matière d’admission des créances entre le créancier, le débiteur et le liquidateur, l’épouse du gérant de la société débitrice, en tant que « personne intéressée » au sens de l’article R. 624-8 du code de commerce, appelante de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa réclamation contre une décision d’admission portée sur l’état des créances, aurait dû appeler à l’instance l’ensemble de ces parties. Cette solution se recommande de l’article 553 du code de procédure civile qui dispose : « En cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel de l’une produit effet à l’égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l’instance ; l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance ».